Une question commence à sérieusement agiter le petit monde agricole. Est-il permis de se dire bio pour une tomate si elle est cultivée sous serre chauffée ? Jusqu’à présent, la réglementation ne le permet pas. « Nous craignons que les pouvoirs publics ne revoient les textes », indique Jean-Marc Lévêque, le président du Synabio, syndicat des entreprises de l’agroalimentaire bio.

Dans un communiqué signé avec la FNAB – Fédération nationale de l’agriculture biologique -, il enfonce le clou en expliquant qu’une tomate produite en France sous serre chauffée est responsable de 4 fois plus de gaz à effet de serre qu’une « tomate importée d’Espagne et 8 fois plus qu’une tomate de saison produite en France ». En face, les producteurs poussent dans le sens contraire affirmant haut et fort ne pas utiliser de pesticides.

Le règlement européen est pour l’instant flou. Il stipule que les cahiers des charges doivent « respecter le cycle naturel » et une « utilisation responsable de l’énergie ». Le CNAB, Comité national de l’agriculture biologique qui se charge d’étudier ce problème épineux, a déjà reporté deux fois son avis consultatif. Il doit à nouveau se réunir en juillet prochain « Si la tomate bio est autorisée dans les serres chauffées, c’est la porte ouverte aux autres légumes comme le concombre ou le poivron », insiste le président du Synabio.

Les producteurs sont d’autant plus enclins à s’engager dans le bio que la demande des consommateurs est très forte. L’an dernier, 21.616 hectares de surfaces maraîchères étaient exploités en bio, en hausse de 15 %.

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Le nouveau label de l’alliance Nature et Saveurs

Conscients qu’il leur sera très difficile de passer au bio sachant qu’une partie importante de leurs périodes de production se font dans des serres chauffées, les trois groupements bretons de tomates Savéol, Prince de Bretagne et Solarenn qui concentrent plus de 50 % de la production française, contournent le problème. Ils se sont récemment unis pour créer un label qui serait une « troisième voie entre le bio et le conventionnel », précisent-ils. Le label Cultivés sans Pesticides, créé par l’alliance Nature et Saveurs, devrait rapidement rassembler près de la moitié des maraîchers des trois coopératives.

A Levroux, dans l’Indre, l’exploitation Tomates Gourmandes vient de lever 100.000 euros dont la moitié apportée par le groupe Carrefour pour financer ses deux chaudières bois qui vont faciliter ses productions sans pesticide.

Un projet de création d’une serre chauffée grâce à un incinérateur des déchets ménagers pour des tomates bio sous serre avait un moment été envisagé près de Dinan sous le nom de « Tom’Rance » moyennant un investissement de 3 millions d’euros, mais il a dû être abandonné.